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Nom

Le latin « agaricum » et le grec « άγαρικόν » font évidemment référence à l’agaric des anciens. Au lieu de désigner un champignon lignicole à pores, il qualifie ici un genre de champignons terricole à lames : une erreur de Linné qui n’a pas compris le sens que donnaient les anciens à ce terme. Le qualificatif « bisporus », de « bi » deux et « sporus » spores, fait référence aux basides de ce champignon qui ne produisent que deux spores au lieu de quatre.

Les agarics sont aussi appelés psalliotes, du grec « ψελιον » bracelet d’ornement, du fait qu’ils possèdent un anneau.

Le champignon de Paris porte le nom de la ville qui lui doit sa renommé. C’est La Quintinie, le jardinier du roi Louis XIV, qui développe au XVIIème siècle la culture du  champignon de couche. Il sera d’abord cultivé dans les jardins du château de Versailles et plus tard dans les catacombes du sud de Paris.

Description

Le champignon de Paris est un champignon saprophyte de la famille de Agaricaceae qui apprécie les substrats riches en azote comme le fumier de cheval. Sa forme sauvage pousse dans les champs et jardins à terre remuée.

Son sporophore est formé d’un chapeau de de 5 à 10 cm, blanchâtre à marge appendiculée, couvert de squames roussâtres à brunâtre. L’hyménium est composé de lames de couleur rosée, noircissant avec l’âge, produisant des spores de couleur noire. Son pied blanc à roussâtre de 4 à 8 cm est orné d’un anneau mixte cotonneux. Sa chaire est rougissante, à odeur et saveur agréables. [1], [2], [3]

Sa comestibilité est bien connue de même que celle de son cousin le rosé de prés Agaricus campestris. Il peut être confondu avec d’autres agarics à chair rougissante ou jaunissante, la lépiote pudique Leucoagaricus leucothites ainsi qu’avec certaines amanites blanches de sous-bois.

Constituants

L’OCDE publie en 2007 un document destiné au commerce alimentaire et détaillant les constituants du champignon de Paris :
- hydrates de carbone : polysaccharides (glucanes, glycogène, chitine), monosaccharides (ribose, fructose, glucose, mannose), disaccharides (tréhalose, saccharose), alcools (mannitol, inositol), acides (acide glucuronique et galacturonique), fibres
- protéines (alanine, arginine, asparagine, glutamine, cystéine...)
- graisses (0.15%) : acide linoléique, acide palmitique
- minéraux : potassium,  phosphore,  sodium,  calcium, magnésium
- vitamines : B3, B9 [4]

Alain Tardif, en 2007, rapporte dans son livre la présence de vitamines E, B1, B2 et B12 ainsi que différents minéraux dont le cuivre, le zinc, le phosphore, le fer et le sélénium. [5]

Usage traditionnel

Nous n’avons pas connaissance d’un usage de ce champignon ou d’un autre agaric en Europe.

Le champignon de Paris « Shuang Bao Mo Gu » est utilisé en médecine chinoise indifféremment du rosé des prés « Mo Gu ». Il fortifie la rate, favorise la digestion, calme le foie et agit comme tonique. Il est employé en cas de mauvaise digestion (pléthore), d’une production insuffisante de lait maternel, d’hypertension, de fatigue et de somnolence. [6]

Littérature

En 2007, le docteur Georges Halpern relate dans son livre sur les champignons médicinaux deux usages du champignon de Paris. D’abord en tant qu’agent anti-néoplasique dans la prévention de la cécité, les lectines contenues dans le champignon prévenant la propagation des cellules épithéliales cancéreuses. Enfin en tant qu’inhibiteur de l'aromatase et des œstrogènes dans le cancer du sein et lors de la ménopause. [7]

Dans son livre sur la mycothérapie paru la même année, Alain tardif indique pour ce champignon des propriétés insuline-like utiles dans le diabète de type 1, ainsi que des effets anti-allergiques et immuno-modulateurs. [5]

En 2014, le même auteur, parlant du rosé des prés A. campestris, mentionne des propriétés antihistaminique à l’état cru et le donne en cure préventive du rhume des foins sur deux mois. [8]

La même année, Jean-Claude Secondé détaille les propriétés du champignon de Paris. Il rappelle ses propriétés insuline-like utiles aux personnes souffrant de diabète de type 1 ainsi que des effets ophtalmologiques dans le traitement des pathologies oculaires, notamment le glaucome et les rétinopathies.  Il rapporte son utilisation en prévention du cancer du sein associé au thé vert matcha, en inhibant la production d’œstrogènes.  Il mentionne enfin son usage dans la facilitation de la digestion en raison de la présence de fibres. [9]

Recherche scientifique

Une étude de 1998 portant sur A. campestris observe une activité anti-hyperglycémique libératrice d’insuline et analogue à l'insuline utilisant les mêmes voies que cette dernière sans affecter sa production ultérieure. Les essais sont réalisés sur des souris à l’aide d’extrait aqueux. Il est rapporté qu’A. bisporus possède lui aussi propriétés similaires. [10]

En 2006 est publiée une étude sur l’activité anti-aromatase d’A. bisporus. Elle observe une inhibition de l’aromatase et de la biosynthèse des œstrogènes. Elle conclue d’une activité anticancéreuse sur le cancer du sein en prévention ainsi qu’en traitement. [11]

Une étude réalisée sur des rats en 2010 observe un effet antioxydant protecteur sur le pancréas ainsi qu’un effet régénérateur sur les cellules β des îlots de Langerhans. Les extraits à l’eau chaude utilisés sont préconisés dans la prévention et le traitement du diabète. [12]

Une étude parue en 2011 découvre des propriétés antioxydantes, immunomodulantes et immunostimulantes dans des extraits à l’eau chaude du champignon. Ces propriétés seraient liées à la présences d’α-glucanes et de β-glucanes. [13]

Un équipe de chercheurs observe en 2015 des propriétés anti-inflammatoires dans les extraits à l’éthanol du champignon vraisemblablement liées à la présence d’acide cinnamique. [14]

Un article de revue de 2016 portant sur l’activité antimicrobienne d’A. bisporus relate un effet antibactérien sur des bactéries Gram+ (B. subtilis) et Gram- (E. coli, P. aeroginosa, K. pneumoniae, L. monocytogenes) ainsi qu’une action antifongique sur S. Aureus. [15]

Marie Rampin, dans sa thèse soutenue en 2017, synthétise les propriétés communes au champignon de Paris A. bisporus et au rosé des prés A. campestris :
- des propriétés anti-allergiques dues aux lectines
- un effet immunorégulateur associé à la présence de β-glucanes
- une action anti-cholestérol liée à la présence de fibres
- des propriétés insuline-like
Elle conseille ces champignons dans les réactions allergiques respiratoires à raison de deux gélules par jour, ces dernières étant composées de 425 mg d’un mélange d’extrait pur et de champignon en poudre. [16]

Enfin, une étude parue en 2019 portant sur des extraits aqueux d’A. bisporus observe une activité antivirale sur l’hépatite C, par inhibition de la réplication du virus. [17]

Références

[1]    R. Courtecuisse et B. Duhem, Champignons de France et d’Europe. 2013.
[2]    G. Eyssartier et P. Roux, Le guide des champignons, France et Europe. 2013.
[3]    M. Bon, Champignons de France et d’Europe occidentale. 2012.
[4]    OCDE, Consensus document on compositional consideratios for new varietes of the cultivated mushroom Agaricus bisporus: key food and feed nutrients, anti-nutrients and toxicants. 2007.
[5]    A. Tardif, La Mycothérapie. 2007.
[6]    J. Zhou, G. Xie, et X. Yan, Encyclopedia of Traditional Chinese Medicines Molecular Structures, Pharmacological Activities, Natural Sources and Applications. 2011.
[7]    G. M. Halpern, Healing Mushrooms. 2007.
[8]    A. Tardif, Les champignons médicinaux. 2014.
[9]    J.-C. Secondé, Les champignons de santé et de longévité. 2014.
[10]    A. M. Gray et P. R. Flatt, « Insulin-releasing and insulin-like activity of Agaricus campestris (mushroom) », Journal of Endocrinology, vol. 157, p. 259‑266, 1998.
[11]    S. Chen et al., « Anti-Aromatase Activity of Phytochemicals in White Button Mushrooms (Agaricus bisporus) », Cancer Research, vol. 66, p. 12026‑34, 2006.
[12]    M. Yamac et al., « Pancreas Protective Effect of Button Mushroom Agaricus bisporus (JE Lange) Imbach (Agaricomycetidae) Extract on Rats with Streptozotocin-Induced Diabetes », International Journal of Medicinal Mushrooms, vol. 12, p. 379‑389, 2010.
[13]    M. Kozarski, A. Klaus, M. Niksic, D. Jakovljevic, J. P. F. G. Helsper, et L. J. L. D. Van Griensven, « Antioxidative and immunomodulating activities of polysaccharide extracts of the medicinal mushrooms Agaricus bisporus, Agaricus brasiliensis, Ganoderma lucidum and Phellinus linteus », Food Chemistry, vol. 129, p. 1667‑1675, 2011.
[14]    O. Taofiq et al., « The contribution of phenolic acids to the anti-inflammatory activity of mushrooms - Screening in phenolic extracts, individual parent molecules and synthesized glucuronated and methylated derivatives », Food Research International, vol. 76, p. 821‑827, 2015.
[15]    S. Rezaeian et H. R. Pourianfar, « Antimicrobial properties of the button mushroom, Agaricus bisporus: A mini-review », International Journal of Advanced Research, vol. 4, p. 426‑429, 2016.
[16]    M. Rampin, « Champignons médicinaux, de l’usage traditionnel aux compléments alimentaires », 2017.
[17]    P. Gallego et al., « Water-soluble extracts from edible mushrooms (Agaricus bisporus) as inhibitors of hepatitis C viral replication », Food & Function journal, vol. 10, p. 3758‑3767, 2019.