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Nom

L’armillaire tire son nom du latin « armilla », bracelet ou anneau, qui a donné le terme d’armille qualifiant un anneau de parure. Une armille désigne en mycologie un voile en forme de chaussette remontant le long du pied du champignon.

Le terme « mellea » signifie doux, suave, de miel.

Description

L’armillaire couleur de miel est un champignon parasite responsable de la maladie appelée pourridié-agaric provocant la pourriture des racines des arbres infestés. Une fois l’arbre mort, le champignon devient alors saprophyte, se nourrissant des reste de son hôte. Enfin, il capable de développer une relation mycorhizienne avec certaines orchidées des genres Galeola et Gastrodia, non présentes en Europe.

C’est une champignon cespiteux de la famille des Physalacriaceae (auparavant Tricholomatacées), poussant en touffe sur les troncs des arbres et parfois au sol, au niveau des racines ou de branches enterrées. Il forme des rhizomorphes ou cordons mycéliens de couleur brun noir visibles sous l’écorce des arbres morts colonisés.

Son sporophore est constitué d’un chapeau de 4 à 15 cm de couleur jaune (miel) à brun jaunâtre couvert au centre de fines mèches brunâtres. Ses lames de couleur crème, parfois tachées de brun, sont légèrement décurrentes. Son stipe est beige jaunâtre, possède un anneau membraneux et mesure jusqu’à 20 cm. Sa sporée est de couleur blanche. Sa chaire est douce, son odeur douce également. Son mycélium produit des rhizomorphes. [1], [2], [3]

Son mycélium possède la particularité d’être bioluminescent grâce à la présence de luciférine. [4]

Il peut être confondu avec d’autres armillaires comme A. solidipes (A. ostoyae), plus sombre, de même que d’autres espèces de champignons lignicoles de genre Pholiota ou Hypholoma, à sporée non blanche.

Une autre armillaire, A. solidipes, détient le record mondial de l’organisme le plus grand avec ses 8,9 km², un poids estimé à 100 tonnes et un age estimé de plus de 2500 ans !

Constituants

Dans la famille des polysaccharides, le champignon contient des α et β-glucanes, du glycogènes, des fibres (cellulose, mannanes, chitine) ainsi que du tréhalose et du mannitol.

Parmi les lipides, l’ergostérol a été identifié ainsi que des sphingolipides (armillaramide) et certains acides gras, dont 70 % d’acides gras insaturés.

Dans les sesquiterpénoïdes, il contient des esters d'aryle (acide armillarique, judéol).

Des alcaloïdes indoliques non hallucinogènes ont également été découverts dans ce champignon dont la sérotonine, la tryptamine et le tryptophane.

Des enzymes comme la protéase, la cellulase, l’hémicellulase, et la peroxydase sont également présents.

De nombreux minéraux ont été identifiés : potassium, magnésium, fer, sodium, zinc, sélénium...

Enfin, d’autres constituants ont été révélés tels que des pro-somatostatines et des dérivés de l’adénosine N6 (AMG-1 et HPMA). [5]

Usage traditionnel

Il n’est pas fait mention, à notre connaissance, d’un usage traditionnel de l’armillaire couleur de miel en Europe.

Ce champignon est utilisé en MTC sous le nom de « Mi Huan Jun » pour traiter les maux de tête, la neurasthénie et l'insomnie. [6]

Le rhizome de l’orchidée Tian Ma (Gastrodia elata), en symbiose avec ce champignon, est utilisée pour ses propriétés anticonvulsivantes, analgésiques et sédatives dans le traitement des convulsions avec tétanos ou épilepsie, des accidents vasculaires cérébraux et des maux de tête. [5]

Il semble que l’armillaire soit à l’origine des propriétés de cette orchidée, du moins elle possède des propriétés identiques. Elle l’a d’ailleurs remplacé dans les préparation suite à la raréfaction de cette dernière.

Littérature

En 2003, Christopher Hobbs rapporte dans son livre une action antibiotique sur S. aureus, B. cereus, B. subtilis et les bactéries Gram+. Il relate ensuite les effets du champignon sur la circulation sanguine : diminue la fréquence cardiaque, réduit la résistance vasculaire périphérique et coronaire, augmente le flux sanguin cérébral, présente un effet protecteur cérébral et augmente l'efficacité coronarienne en oxygène sans altérer la pression artérielle. Une activité sédative et anti-convulsive est évoquée ainsi qu’un effet protecteur contre les effets secondaires des rayonnements ionisants. Il rapporte enfin une étude clinique démontrant qu’il réduit les symptômes de l'hypertension essentielle et rénale, ainsi que la neurasthénie. La posologie proposée est de 30 à 90 grammes de poudre séchée par jour,  en gélules, parsemé sur les aliments ou sous forme d’infusion. [7]

Alain Tardif résume dans son livre publié en 2014, les propriétés de l’armillaire couleur de miel :
- action antagoniste de l'adrénaline (ralentit le rythme cardiaque)
- action calmante en cas d'insomnie et d'anxiété
- propriété antibiotique (acide armillarique)
- propriété œstrogénique (genistéine, daidzéine) utile dans les bouffées de chaleur
- protecteur et draineur rénal (D-mannitol)
Il note aussi que ce champignon est peu sensible aux pollutions par les métaux lourds. [8]

Dans un autre livre sur les champignons médicinaux publié la même année, Jean-Claude Secondé rapporte son usage dans l’épilepsie, le syndrome de Meunière et les sensations de vertige grâce à son niveau élevé de polysaccharides. Il mentionne aussi un effet modulateur sur la glycémie et la lipidémie. Enfin, il évoque des propriétés immunostimulantes. [9]

Recherche scientifique

Une étude parue en 2007 fait état d’une puissante activité anti-inflammatoire, cela sans les effets secondaires des anti-inflammatoires non stéroïdiens (inhibe les COX-2 sans inhiber les COX-1). [6]

Un article de revue de 2009 rapporte les propriétés antioxydantes, immunostimulantes, anti-vertige et anti-age des polysaccharides d’A. mellea. Elle relate ensuite des propriétés antibiotique et antifongique dues aux sesquiterpènes aryle esthers. Ses enzymes de type metalloprotéase lui conféreraient des propriétés fibrinolytiques (anti-thrombose). Enfin, le dérivé AMG-1 démontre une activité anti-vertige et protecteur cérébral (1000 fois plus forte que l'adénosine). Sur le système immunitaire, le champignon se révèle immunostimulant avec un effet protecteur sur la moelle osseuse. Sur le système circulatoire, il réduit la viscosité du sang, l'agrégation plaquettaire et améliore l'apport sanguin cérébral. Sur le métabolisme, il démontre un effet hypoglycémiant et hypolipidémiant sanguin. Un effet antimicrobien est rapporté sur bactéries Gram+, les levures et les champignons. Enfin, une activité anti-oxydante ainsi qu’un effet anti-mutagène sont signalés. [10]

En 2011 paraît un autre article de revue qui liste les modes d’actions des différents constituants d’A. mellea :
- polysaccharides : les fibres (cellulose, mannanes, chitine) ont action au niveau de l’absorption intestinale du cholestérol et des triglycérides, chitine et glucanes  influencent le système immunitaire, abaissent la tension artérielle et produisent des effets hypoglycémiants, antibactériens, antiviraux et anti-inflammatoires
- stérols : l’ergostérol est anticancéreux, les  sphingolipides (armillaramide) sont anticancéreux, anti-hépatotoxiques et immunostimulants
- sesquiterpénoïdes : les arylesters sont anticancéreux et antibiotiques
- alcaloïdes indoliques :  la sérotonine régule le sommeil, la température corporelle, l'humeur, la maturation, la régénération cellulaire et la croissance, influence la disposition psychologique, affecte l'appétit et la sensibilité à la douleur
- enzymes : les protéases présentent des propriétés fibrinolytiques
- minéraux : le sélénium est antioxydant
- autres : les pro-somatostatines sont anticancéreux au niveau du pancréas, l’acide armillarique est antibactérien Gram- et antifongique, l’AMG1 est neuroprotecteur et l’HPMA est un agoniste du récepteur A1. [5]

Une étude parue en 2013 démontre ses propriétés anti-vertigineuses par un effet agoniste sur le récepteur A1 de l’adénosine. Elle évoque des effets potentiellement anti-épileptogènes, protecteurs sur le rein, sur le cœur (anti-arythmogène, anti-angineux) et sur les nerfs périphériques. Enfin, elle rapporte un effet fibrinolytique en dénotant un risque si associé à un antiagrégant plaquettaire ou un anticoagulant. [11]

L’année suivante paraît une autre étude sur une forme modifiée d'AMG-1 (WS0701) extrait d’A. Mellea dont elle rappelle les effets neuroprotecteurs et anticonvulsifiants. Cette molécule démontre des propriétés anxiolytiques agissant sur la peur, les comportements anxieux et la mémoire dans le cadre du syndrome de stress post-traumatique (SSPT). [12]

En 2016, une étude portant sur les propriétés anti-oxydantes d’A. Mellea relève un potentiel antioxydant élevé des organes de fructification du champignon. Les extraits aqueux contenaient des niveaux trois fois plus élevés de phénols et de flavonoïdes associés à ces effets par rapport aux extraits de méthanol. Entre autres molécules présentes dans le champignons, elle évoque des flavonoïdes, β-carotène, lycopène et des β-glucanes. [13]

Pour finir, une étude effectuée en 2018 observe les effets du champignon sur le diabète. Elle constate un abaissement de la glycémie à jeun, une amélioration de l'intolérance au glucose et de la résistance à l'insuline. Concernant la régulation du métabolisme lipidique, elle observe une diminution des triglycérides sériques et une inhibition de l'accumulation de lipides dans le foie. [14]

Références

[1]    R. Courtecuisse et B. Duhem, Champignons de France et d’Europe. 2013.
[2]    G. Eyssartier et P. Roux, Le guide des champignons, France et Europe. 2013.
[3]    M. Bon, Champignons de France et d’Europe occidentale. 2012.
[4]    K. V. Purtov et al., « The Chemical Basis of Fungal Bioluminescence », Angewandte Chemie, vol. 54, p. 8124‑8128, 2015.
[5]    B. Muszyńska, K. Sułkowska-Ziaja, M. Wołkowska, et H. Ekiert, « Chemical, pharmacological, and biological characterization of the culinary-medicinal honey mushroom Armillaria mellea », International Journal of Medicinal Mushrooms, vol. 13, p. 167‑175, 2011.
[6]    S.-J. Wu, J.-Y. Tsai, M.-N. Lai, et L.-T. Ng, « Armillariella mellea Shows Anti-inflammatory Activity by Inhibiting the Expression of NO, iNOS, COX-2 and Cytokines in THP-1 Cells », The American Journal of Chinese Medicine, vol. 35, p. 507‑516, 2007.
[7]    C. Hobbs, Medicinal mushrooms. 2003.
[8]    A. Tardif, Les champignons médicinaux. 2014.
[9]    J.-C. Secondé, Les champignons de santé et de longévité. 2014.
[10]    L. W. Gao, W. Y. Li, Y. L. Zhao, et J. W. Wang, « The cultivation, bioactive components and pharmacological effects of Armillaria mellea », African Journal of Biotechnology, vol. 8, p. 7383‑7390, 2009.
[11]    B. Donatini, « L’Armillaire miel : un agoniste adénosine A1 actif contre les vertiges et un agent potentiel contre les effets délétères de l’ischémie », Phytothérapie, vol. 11, p. 39‑41, 2013.
[12]    Z. -l. Huang et al., « Protective effects of the novel adenosine derivative WS0701 in a mouse model of posttraumatic stress disorder », Acta Pharmacologica Sinica, vol. 35, p. 24‑32, 2014.
[13]    I. Strapáč, M. Baranová, M. Smrčová, et Z. Bedlovičová, « Antioxidant Activity of Honey Mushrooms (Armillaria mellea) », Folia Veterinaria, vol. 60, p. 37‑41, 2016.
[14]    S. Yang et al., « Polysaccharide-Enriched Fraction from Amillariella », Molecules, vol. 24, p. 46, 2018.